L’ancien collège jésuite
Un collectif d’architectes (r)anime un ancien collège monument historique : une programmation ouverte menée avec ses usagerEs et tous les acteurs du territoire autour de la réversibilité du patrimoine
Acteurs au démarrage : Ville de Billom, Billom Communauté, Pays d’Art et d’Histoire, Le Grand Clermont, Parc Naturel Régional du Livradois-Forez, Direction Régionale des Affaires Culturelles Auvergne – Rhône Alpes, Conseil départemental du Puy-de-Dôme, Conseil Régional Auvergne Rhône-Alpes, Architectes des Bâtiments de France.
Premiers travaux de gros œuvre (2017-2019) : En 2016, une étude est lancée pour établir un diagnostic patrimonial et sanitaire du site. Réalisée par le bureau d’architectes ACA (Yvon Cottier, Architecte du patrimoine), elle a permis d’identifier et d’évaluer les travaux d’urgence et de sécurisation du bâtiment et d’en estimer les coûts (300 000 €). Les travaux sont subventionnés à hauteur de 70% par l’État (DRAC), la Région Auvergne-Rhône-Alpes et le Département du Puy-de-Dôme.
Première phase d’occupation (2019-2022) : Mission d’animation pour la réappropriation et la mise en usage de l’ancien collège confiée par la Ville de Billom assurée par le collectif Rural combo.
- Montant total du marché : 160 492, 80€ TTC dont : 23 551€ pour les travaux annuels, 94 805€ pour l’animation de la permanence 21 semaines par an. La Fondation de France finance également la permanence à hauteur de 9 500€ pour l’aménagement du parvis devant l’ancien collège et l’expérimentation d’outils de participation habitante
Seconds travaux de gros œuvre : Fin 2019, afin de poursuivre les travaux engagés, la Ville lance un marché visant à conduire la réfection des couvertures, la consolidation et la restauration de la charpente ainsi que la restitution partielle de menuiseries (fenêtres et portes intérieures et extérieures) et la consolidation partielle des enduits et badigeon de l’ancien collège. Les travaux démarrent en octobre 2022, la maîtrise d’œuvre est assurée par le bureau d’architectes ACA (Yvon Cottier, Architecte du patrimoine). Ils sont estimés à 1 216 000 € HT (hors honoraires de la maîtrise d’œuvre et ordonnancement – pilotage – coordination). La Ville est subventionnée à hauteur de 70% par l’État (DRAC), la Région Auvergne-Rhône-Alpes et le Département du Puy-de-Dôme.
Seconde phase d’occupation, en cours de définition (2023-2026) : Mission d’assistance à maîtrise d’ouvrage et d’usage de l’Ancien Collège de Billom, remportée par Rural Combo. La mission porte sur un apport indispensable en ingénierie, notamment en architecture (en articulation avec les travaux de gros œuvre et en lien avec la conservation régionale des Monuments Historiques) mais aussi concernant l’accompagnement des usagerEs à la gouvernance et à la construction d’un modèle économique pérenne aux fins de permettre à l’expérimentation d’être confortée dans la durée. Elle est encadrée par une convention d’occupation temporaire pour une durée de trois ans à titre gracieux.
- Montant total du marché : 167 832€, dont : 60 900€ dans l’accompagnement de la Ville et des usagerEs dans la restauration et l’aménagement de l’ancien collège et 37 410€ dans l’accompagnement des usagerEs dans la gouvernance du lieu et la construction d’un modèle économique pérenne. Ce montant est financé à 50% par le programme « Petites villes de demain » (ANCT), 30% par le Groupement d’Intérêt Public du Massif central et 20% par la commune de Billom.
1555 : Ouverture, à Billom, du premier collège jésuite en France. Les Jésuites seront bannis de France à plusieurs reprises, notamment en 1763 (la Compagnie de Jésus sera restaurée en 1814)
1841 : Transformation de l’ancien collège en caserne, puis en école militaire en 1884
1963 : Transformation de l’école militaire en collège d’enseignement général
1994 : Déménagement du collège d’enseignement général dans un nouvel établissement voisin de l’ancien collège
1997 : Rétrocession de l’ancien collège à la commune par le Conseil départemental ; animation de la cour intérieure par une association ; un programme pour transformer le lieu en logements sociaux et en équipements publics est entamé mais vite interrompu, faute de moyens
2016 : Élection d’une nouvelle équipe municipale, qui modifie substantiellement le Plan Local d’Urbanisme de la commune et entame la réflexion sur une réouverture sans programme de l’ancien collège
2017 : Lancement de travaux d’urgence et de sécurisation du bâtiment
2018 : Rencontre entre Jacques Fournier, Rural Combo et la Preuve par 7
2019 : Publication de l’appel d’offres pour la réouverture de l’ancien collège, remporté par l’association Rural Combo, qui lance, en mai, le chantier de la permanence architecturale, et rouvre, en septembre, le rez-de-chaussée du bâtiment
2021 : Création de l’association La Perm 2021, regroupant des résidentEs actuelLEs de l’ancien collège, qui assure progressivement et de manière de plus en plus autonome la gestion du lieu
2022 : Lancement de nouveaux travaux (menuiserie, charpente, enduits…)
2023 : Nouvelle mission d’assistance à maîtrise d’ouvrage et d’usage et nouveau conventionnement entre la mairie de Billom et l’association La Perm pour l’occupation du lieu
L’école de la permanence
Rédaction : L’École du terrain, février 2023
Entretiens avec Louise Mallard, Emmanuelle Guyard et Paul Chantereau / Rural Combo ; Jacques Fournier / Ville de Billom
Ils sont plusieurs dizaines à voguer sur un grand navire déjà bien chargé et, de partout, il en monte encore depuis de petites embarcations. Ils ont la foi, naviguant sur une mer agitée et peuplée de créatures étranges. Ils savent où ils veulent aller mais le port est encore loin. « C’est une copie, l’original est à Paris », explique Jacques Fournier, conseiller municipal délégué au patrimoines de Billom (4 788 habitantEs). Est-ce seulement pour mémoire qu’une copie de ce grand tableau allégorique de la fin du XVIe siècle1, qui figure la nef de la Foi gouvernée par les ordres religieux, Jésuites en tête, naviguant tant bien que mal vers le port du Salut, a été placée dans une des salles de l’ancien collège de la ville ? Elle rappelle en tout cas que le lieu a une histoire ancienne. Premier collège jésuite installé en France en 1555, pour partie converti en caserne (1841) puis en école militaire (1884), il devient collège d’enseignement général en 1963 avant de fermer ses portes en 1994 suite à la construction, de l’autre côté du parvis, d’un nouvel établissement scolaire.
Dès lors, que faire de cet imposant quadrilatère de 7 400 m² répartis sur quatre niveaux autour d’une vaste cour intérieure, rétrocédé par le Conseil départemental à la commune en 1997 et inscrit au titre des monuments historiques en 2002 ? « Le vendre ? Le retaper ? », demande Jacques Fournier. La question se pose à la Ville de Billom, qui possède également deux églises, un beffroi et un hôtel de ville à restaurer, comme à toutes les communes propriétaires de lieux vacants qu’il s’agit de réhabiliter, au double sens de réparer et de « rendre à l’estime publique ». En creux, c’est la question de la réversibilité du patrimoine, de son réusage qui est ici en jeu.
Après plusieurs années à naviguer, l’élection, en 2016, d’une nouvelle municipalité qui affirme sa volonté de valoriser le patrimoine architectural existant au sein du centre bourg et de préserver de l’urbanisation les espaces non artificialisés, ouvre la voie pour « faire de ce gros vaisseau en cœur de bourg un commun ». Sans une remise en état, et surtout une mise aux normes s’inscrivant dans le cadre de la restauration des monuments historiques, il ne peut plus accueillir personne. Mais la Ville n’a pas les moyens nécessaires à la restauration complète du bâtiment. Elle lance néanmoins des travaux d'urgence et de sécurisation, sur la base d'un premier diagnostic. À l’été 2018, Jacques Fournier rencontre la Preuve par 7 et Rural Combo, ce qui conforte la commune dans son projet et sa méthode pour rouvrir l’ancien collège. Appuyée par le Parc Naturel Régional du Livradois-Forez, elle lance un marché d’assistance à maîtrise d’ouvrage « pour une mission d’animation pour la réappropriation et la mise en usage de l’ancien collège à Billom » sur une durée de trois ans. Le collectif d’architectes, graphistes, designers, constructeurs et constructrices Rural Combo est choisi pour s’y installer. La mission, inédite, repose sur la réouverture progressive du lieu. Elle consiste à préfigurer et à tester des usages et des activités, à conduire des chantiers de menus travaux, à accompagner tant la Ville que les habitantEs aux fins de se l’approprier et d’y accueillir des porteurs de projets. C’est le principe de la programmation ouverte. L’idée émerge d’occuper l’ancien collège presque tel quel en y installant une permanence architecturale.
Cette remise en usage ouvre de nombreux questionnements : la démarche de programmation ouverte, dont les collectivités et les services de l’État sont peu familiers pour ce type de monument, s’accommode mal des protocoles usuels en matière de restauration du patrimoine. D’ordinaire, une programmation figée et chiffrée est un impondérable pour lancer les travaux de restauration et débloquer les fonds nécessaires. Ici, à l’inverse, la programmation ouverte implique de reprendre le temps, de permettre au projet de se concrétiser et d'advenir par la mise à l'épreuve publique et collective de l’espace en vue de dessiner le programme. En ce sens, cette méthode ne s’inscrit dans aucun cadre d’intervention établi et n’émarge pas aux lignes budgétaires classiques. En prenant comme point de départ les contraintes existantes et en agissant progressivement, la mise à disposition de l’ancien collège suscite une programmation riche et multiple par les structures locales elles-mêmes.
Le collectif Rural Combo a également initié la structuration d’une gouvernance du lieu pour aller au-delà d’une relation propriétaire / gestionnaire / occupantEs et asseoir l’appropriation du projet par la société civile locale. Enfin, cette manière de faire amène à changer lentement de regard, à définir collectivement de nouvelles voies pour assurer la réhabilitation et la remise en usage de notre patrimoine historique.
C’est donc bien l’histoire de citoyenNEs, d’éluEs, d’architectes, d’urbanistes et de constructeurs et constructrices qui ont foi dans un urbanisme en commun, dans la permanence architecturale et la programmation ouverte, progressivement rejoints par tout un collectif de résidentEs et de BillomoisEs, qu’il faut ici raconter.
Rouvrir l’ancien collège à la vi(ll)e et à ses habitantEs
La réouverture de l’ancien collège de Billom s’inscrit dans une réflexion plus ancienne et plus large. Plus ancienne car, de 1996 à 2008, l’association « Billom Côté Cour » organisait, dans la principale cour du collège tout juste désaffecté, des activités culturelles et associatives ponctuelles. La municipalité avait ensuite initié des actions pour transformer le lieu en logements sociaux et en équipements publics mais le projet avait dû être interrompu faute de moyens et d’opérateurs.
Plus large car cette réouverture s’ancre dans un changement de politique urbaine, initiée au mitan des années 2010 par le nouveau maire Jean-Michel Charlat et Jacques Fournier, alors adjoint à l’urbanisme. « Le centre historique de Billom, explique ce dernier, est entouré par un boulevard circulaire très commerçant qui le sépare des quartiers plus récents où se trouvent notamment plusieurs supermarchés. Depuis des années, nous voyions le centre-bourg se vider. À notre arrivée, nous avons donc décidé de réécrire le Plan Local d’Urbanisme (PLU)2 pour y remettre de la vie et éviter l’étalement pavillonnaire. Nous avons enlevé vingt hectares de terrains constructibles hors du centre et avons interdit la construction de nouveaux commerces en périphérie sur le boulevard circulaire afin qu’ils s’installent plutôt dans le centre. Dès lors, rouvrir l’ancien collège, lui-même en plein cœur de ville, devenait un des autres axes majeurs de cette politique ». Une « étude de potentiels d’activité » est lancée en 2017 par la métropole du Grand Clermont qui propose, pour un budget de vingt à trente millions d’euros de travaux, de transformer l’ancien collège en espaces de coworking, fab lab et lieu culturel. « Nous n’avions évidemment pas l’argent, continue Jacques Fournier, et aurions dû attendre encore dix ou quinze ans avant que le lieu ne rouvre... Surtout, nous voulions refaire de ce lieu un commun, le rouvrir le plus vite possible pour que les habitantEs se le réapproprient en l’occupant ». En effet, ni le budget pour les travaux, ni les opérateurs ou investisseurs capables de s’engager dans ce projet ne sont identifiés dans le cadre de l’étude. Accompagnée par la Preuve par 7, la municipalité veut tenter l’expérience d’y installer une permanence architecturale aux fins de l’accompagner, elle et les habitantEs, dans l’élaboration d’une programmation ouverte au fur et à mesure de la réouverture des différents espaces.
Elle lance donc, début 2019, un appel d’offre « pour une mission d’animation pour la réappropriation et la mise en usage de l’ancien collège de Billom ». Rédigé avec l’aide de l’équipe du Parc Naturel Régional du Livradois-Forez et financé à 80% par les fonds LEADER3, ce marché est d’un genre nouveau : il dépasse la classique mission d’animation d’un lieu à destination du public et des scolaires en y ajoutant, grâce à la permanence architecturale, l’accompagnement de la commune et des futurs résidentEs dans une « stratégie d’occupation ». En somme, s’installer sur le site du projet, y mener des premiers travaux de sécurité et d’aménagement et travailler à sa programmation in situ et en action. Soit la « reconquête », sur ces trois ans, « des espaces du rez-de-chaussée et de la cour » pour préfigurer l’occupation du bâtiment « à travers une phase d’expérimentation d’usages potentiels ».
Rural Combo, un collectif qui habite plus haut, dans les monts du Livradois, remporte le marché et devient assistant à la maîtrise d’ouvrage. L’une de ses membres, Emmanuelle Guyard, designer, s’installe comme première permanente de l’ancien collège. « Ce lieu est précieux, s’exclame-t-elle en novembre 2019, juste après la réouverture du collège, parce que, dans l’imaginaire collectif, il compte pour beaucoup de gens. Il est, depuis toujours, un espace de transmission : de maître à élève, de l’individu au collectif, d’une génération à une autre. Et chaque génération d’occupantEs l’a transformé. Dire que personne ne peut plus entrer dans ce bâtiment qui a accueilli des milliers de personnes pendant 500 ans parce qu’il n’est plus aux normes, c’est triste. Alors on pousse une porte et on voit qui entre ».
Le premier chantier pour rouvrir le lieu : des gestes pour expérimenter et raconter
Rural Combo n’est pas une association comme les autres. La diversité des compétences de leurs membres (architecte, urbaniste, charpentier, constructeur avec la terre, designer, administratrice, jardinier) nourrit leur réflexion sur le décloisonnement des métiers et des savoirs. « Dans le domaine de la construction, nous nous sommes rendus compte de la déconnexion entre les savoirs intellectuels des architectes ou des gestionnaires de projet et les savoirs manuels des constructeurs, des entreprises et des habitants », explique Baptiste Furic, architecte. Pour cette bande d’amis anciennement urbains venus s’installer dans un village du Puy-de-Dôme, c’est la volonté de « reconnecter, dans le monde de la construction, la main et la tête », « de connaître un peu tous les savoir-faire, de parler avec ceux sur le territoire qui les maîtrisent encore et de les transmettre à ceux qui les ont perdus ».
L’association ne dispose d’aucunE salariéE, limitant ainsi les frais fixes. ChacunE de ses membres est auto-entrepreneurE et facture ses prestations à l’association qui se finance grâce aux missions qu’elle remporte et aux subventions qu’elle obtient par ailleurs : de la Direction régionale des Affaires Culturelles Auvergne-Rhône Alpes pour des interventions artistiques sur le lieu, de la Fondation de France pour aménager le parvis des collèges avec une classe de 4ème et expérimenter des outils de participation habitante, de la Caisse des Dépôts Mécénat pour mettre en récit ces chantiers à travers des textes et des podcasts. « Nous avons une réunion mensuelle pour parler tous ensemble de nos projets, explique Paul Chantereau, architecte. Puis, deux fois par an, un séminaire comptabilité où nous mettons en commun les comptabilités de tous les projets et où nous faisons le point sur le budget ». Un budget qui varie entre 100 000 et 150 000 euros selon les années.
Au printemps 2019, Rural Combo investit donc l’ancien collège sans y loger : « Ça a été un choix affirmé par tous, explique Louise Mallard, administratrice et nouvelle permanente, avec Paul Chantereau, depuis 2021. « Nous habitons à 30 kilomètres de Billom mais c’est un souhait de travailler sur des territoires proches. Se pose néanmoins la question de notre légitimité : qui sommes-nous pour répondre aux besoins des habitants sur un territoire que nous n’habitons pas ? Mais en discutant avec les usagers du lieu, j’ai compris que pour eux, c’était important d’avoir un avis extérieur et de prendre du recul. Je sais cependant que je suis dans un entre-deux. Je dois être présente pour comprendre et accompagner ce qui se passe et, à un moment, je dois aussi me retirer et prendre mes distances pour laisser faire ».
Cela pourrait sembler inconfortable. Dans cette dialectique du proche et du lointain, qui semble faire écho au tableau du début, s’approcher permet de saisir les détails, de toucher, de sentir mais il faut prendre du recul pour voir l’ensemble de la composition. « Je me sens plus légitime en n’habitant pas sur place, conclut Paul Chantereau, et notamment parce que cela contribue à mon bien-être. De fait, sur certaines choses, nous sommes moins légitimes à faire des choix qu’à accompagner les gens pour essayer de les faire. La permanence et la programmation ouverte nous permettent de donner aux citoyens la capacité d’être eux-mêmes les acteurs du projet. Dans un lieu comme celui-ci, les compétences d’architecte sont nécessaires mais pas suffisantes ».
La mission d’assistance à maîtrise d’usage de Rural Combo est signée en avril 2019 avec la municipalité en même temps qu’une convention d’occupation des lieux. « La mission avait trois axes. D’abord, ouvrir des espaces, ensuite faire en sorte qu’il y ait de l’animation dans le lieu, et, enfin, fédérer les usagers à travers une gouvernance commune ».
D’abord donc, avec l’argent du marché d’animation, un chantier de quatre mois pour prendre possession du lieu fermé depuis 25 ans, valoriser ses atouts et le rendre chaleureux comme pour y inviter de nouveaux et nouvelles amiEs. Un chantier qui, dans l’esprit de la programmation ouverte, s’est toujours assuré d’effectuer des actions réversibles et mobiles aux fins de solliciter le moins possible les conservateurs des monuments historiques. Y compris pour les fenêtres, murées par des parpaings, qui ont été dégagées et, leur verre étant souvent cassé, protégées par des claustras en bois construits par Rural Combo. L’ouverture des fenêtres avait, en effet, été signalée dans l’étude préalable à la restauration du bâtiment, commandée par la commune en 2016 à Yvon Cottier, architecte du patrimoine, maître d’œuvre par la suite des travaux de sécurisation du lieu. Rural Combo aménage également la cuisine, dégage tout le rez-de-chaussée, y créé du mobilier et des portes intérieures, sécurise l’intérieur du bâtiment et équipe l’atelier partagé en outillage collectif. Un chantier que l’association mettra plus tard en récit dans ses « contes à re-bourg », où les sujets majeurs du réemploi, des normes, des matériaux ou de la collégialité sont figurés dans des fables imagées comme des cartes de tarot.
Les gestes de Rural Combo sont donc étroitement liés à la geste qui consiste à les raconter, et de manière originale et ludique.
En septembre 2019, plus de 600 personnes se pressent pour la réouverture du lieu. L’ancien collège se referme ensuite durant les mois d’hiver puisque, sans aucun dispositif de chauffage, il y fait trop froid. Malgré la crise sanitaire, une brèche, à l’été 2020, permet à Rural Combo d’en éprouver les premiers usages. « La règle était alors de proposer à qui veut de faire quelque chose ici, en repartant systématiquement avec ses affaires, ceci afin que personne ne s’accapare trop vite le lieu et pour laisser la porte ouverte à un maximum de personnes ».
Autonomiser les usagerEs via une gouvernance collégiale
Mener de front une manière d’étude de faisabilité en actes, de menus travaux et une réflexion sur la gouvernance, tels sont donc les trois objectifs de la permanence, directement inspirée de celle de l’Hôtel Pasteur. Sur ce dernier point, l’ambition est claire : « structurer les occupantEs - usagerEs et leur donner les outils pour autogérer le lieu, y compris dans sa dimension économique ». Dès lors, comment mettre en place une gouvernance ouverte, accueillante pour de nouveaux bénévoles, écologique, la plus horizontale possible, qui permette à chacunE de lancer ses propres projets tout en veillant à « défendre le bien commun - que ce soit le projet associatif ou le bâtiment lui-même » ? Cela passe d’abord par l’organisation, avec les premiers usagerEs, d’ateliers « règle du jeu », « des méthodes d’animation pour décider collectivement des règles à appliquer ». L’exercice sera renouvelé toute une journée en 2021, à l’issue de laquelle les résidentEs s’accordent sur une charte et sur l’idée de créer une association pour gérer le lieu. « Au début, c’était la grande inconnue, raconte Louise Mallard. Nous avons utilisé des outils issus de l’éducation populaire, notamment la méthode de la boule de neige. ChacunE répond à un questionnaire de quatre questions : c’est quoi la permanence pour toi ? Comment l’imagines-tu dans cinquante ans ?, etc. Manière de remettre du futur dans le présent. Nous formions ensuite des groupes de deux, qui remplissaient à nouveau le questionnaire, puis à quatre, puis à huit... Nous avions à la fin trois projets de charte, qui se ressemblaient beaucoup et dont nous avons fait la synthèse. À partir des mêmes outils, il a fallu ensuite réfléchir à l’association : que devra-t-elle décider ? Aura-t-elle des adhérents ? Si oui, à quel prix d’adhésion ?, etc. Nous avons utilisé les statuts classiques et assez sommaires d’une association dont nous avons extrait tous les points à discuter ensemble, sous une forme visuelle et avec une manière de travailler, par exemple les ateliers, adaptée à la question. À la fin de la journée, nous avions la matière pour rédiger les statuts ».
Une association de préfiguration, pour un an d’abord, afin, là encore, d’essayer sans « rien pérenniser trop vite » et « pouvoir tout remettre en branle ». Reprenant le vocabulaire de l’école, les adhérentEs de l’association sont des collégienNEs, diviséEs en quatre « classes » thématiques : communication, économie, régie et programmation. Chaque classe élit pour six mois deux déléguéEs qui sont donc huit à former le « conseil de classe », conseil d’administration de l’association avec huit co-présidentEs. La ville et Rural Combo y sont présents en tant que CPE, pour Conseillers Principaux d’Expérimentation, mais n’y ont pas droit de vote. Manière pour la Ville, propriétaire du bâtiment dont elle doit assurer la sécurité et l’administration, d’être un « médiateur », selon le mot de Jacques Fournier. Et pour Rural Combo « d’accompagner les usagerEs en leur donnant les outils et les capacités d’être en autogestion sur ce lieu ». De composer, comme ils le disent, « un cadavre exquis dont ils ne seraient maîtres que des plis ».
L’association « La Perm » est ainsi créée en juin 2021. La convention d’occupation temporaire amendée à la suite de la prolongation de la mission de Rural Combo, devient tripartite avec la Ville et Rural Combo. La Perm conclut ensuite des conventions de mise à disposition avec les occupantEs, adhérentEs de l’association, qui investissent les espaces de manière ponctuelle (pour un concert), régulière (à l’occasion du marché hebdomadaire par exemple) ou permanente (comme l’atelier de création de mobilier en carton de récupération)4. Début 2022, une assemblée générale est organisée pour renouveler les déléguéEs et tracer la feuille de route de l’année. Rural Combo a pu y mettre à plat tous les sujets qu’implique la gestion d’un lieu comme l’ancien collège, laissant aux adhérentEs le soin de les prioriser. Beaucoup a déjà été transmis à l’association La Perm, autonome sur la programmation, par exemple, et désormais pérennisée.
Fin 2022, l’approche de la fin de la mission de Rural Combo a été l’occasion d’une remise en question de la gouvernance. À la faveur d’ateliers organisés avec les adhérentEs de l’association, les statuts de la Perm ont évolué. L’organisation en classes thématiques avait été pensée pour concevoir des outils de gestion dédiés à chaque domaine. Ces outils étant aboutis et mis en œuvre, il est désormais loisible de lister, de manière transversale, les tâches de gestion courante.
Dès lors, la nouvelle organisation de l’association se simplifie : il n’existe plus qu’une seule catégorie d’adhérentEs qui élisent un bureau collégial. Celui-ci conserve son caractère non hiérarchique (tout le monde y est co-présidentE) et peut accueillir autant de membres que souhaité. Il se réunit un samedi par mois, afin d’ouvrir la participation au maximum de membres, et discute d’abord des sujets de gestion avant de débattre des sujets du moment. Lorsqu’il est besoin de réfléchir à la création d’un nouvel outil de gouvernance, un groupe de travail ad hoc et temporaire est mis en place. L’association avance ainsi dans son chemin d’autonomisation et vient de conventionner « en tête à tête » avec la mairie pour l’occupation des lieux, sans Rural Combo.
Une telle organisation requiert un fort investissement de la part de ceux que l’on n’appelle plus « collégienNEs », tous bénévoles. D’où l’émergence d’une grande question autour du bénévolat et du modèle économique. « Nous avons essayé d’introduire des notions d’économie contributive, raconte Louise Mallard, c’est-à-dire de ne pas être un simple lieu qui met à disposition des espaces au prix du mètre carré mais de demander une participation minimale aux frais d’électricité, d’eau et d’assurance ainsi qu’une contrepartie matérielle ou en temps, de telle sorte que les personnes s’impliquent vraiment dans le projet et ne soient pas que des consommateurs d’espace ».
Une monnaie interne a ainsi été créée par les résidentEs, le « clou ». À la fin du mois, chacunE d’entre eux estime le nombre de ses heures, au-delà du bénévolat, qui devrait, selon lui, mériter une indemnisation. Une heure équivalant à six clous (soit six euros), le résident pourra, avec cette monnaie, consommer au bar, troquer du temps avec quelqu’un d’autre ou payer son loyer. Car chaque résidentE doit aussi s’acquitter d’une redevance, liée à son inscription à l’association. « Pour l’occupantE permanentE d’un espace dans les étages, c’est 20 euros l’année. Pour unE occupantE régulierE, comme l’AMAP, c’est dix euros l’année. Et pour toute personne qui occupe temporairement un espace, c’est 0,07 centime le mètre carré par jour et 0,04 si elle le ferme et le privatise. À titre d’exemple, la pièce où nous nous trouvons (un large salon d’environ 70m2 près du bar) coûterait 2,70 euros de participation aux charges journalière ». Mais cette dernière règle, administrativement complexe à gérer, est en train d’être révisée.
Pour se financer, la Perm, qui dispose de son propre budget, organise également deux événements par an, à l’image d’une kermesse, qui ont rapporté chacun mille euros de bénéfices l’an dernier. En novembre 2022, la Perm a été lauréate du budget écologique citoyen, décerné par le Conseil départemental, doté de 40 000€ d’investissement aux fins d’améliorer l’aménagement et l’équipement des espaces partagés. Elle peut également compter sur les dons et les cotisations.
Car le bâtiment dans lequel est installée la Perm a des frais, notamment d’assurance5. Deux euros par mètre carré occupé. « Une facture assez salée, concède Louise Mallard. Dans n’importe quel bâtiment, le propriétaire assure et l’occupantE a également une partie. Si nous voulions occuper tout l’espace, cela nous coûterait 7 000 ou 8 000 euros par an, ce dont nous n’avons pas les moyens ». Mais une réunion avec l’assureur de la ville va changer les choses.
« La mairie de Billom a mis cette clause à l’article 3 de notre convention d’occupation et nous ne payons donc rien pour le bâtiment ». Cette clause, relativement courante pour les monuments historiques, y compris dans le cas d’occupations temporaires, diminue le montant de la prime d’assurances tout en maintenant inchangé le niveau d’indemnisation.
Patrimoine et réusage : une programmation ouverte respectueuse de la conservation du patrimoine
Ouvrir l’espace, tel était le premier enjeu de la permanence. Au fil des mois, les travaux progressent à mesure que la mission de Rural Combo « s’étire », comme le dit Paul Chantereau, avec l’envie d’occuper des espaces dans les étages et « d’accompagner des projets plus importants, comme celui de l’intercommunalité d’y déplacer l’école de musique ».
Cela passe nécessairement par de nouveaux travaux (10 000€ par an, issus de la mission d’assistance à maîtrise d’ouvrage, leur sont dédiés), rendus plus délicats dans ce lieu inscrit aux monuments historiques. Au quotidien, Rural Combo et les usagerEs s’appuient sur le code du patrimoine qui encadre les travaux menés sur un bien inscrit ou classé au titre des monuments historiques. Les architectes doivent distinguer d’une part, les travaux d’entretien courant ou de réparation ordinaire qui ne requièrent aucune formalité, et d’autre part les travaux de restauration qui nécessitent dans certains cas le recours à une maîtrise d’œuvre spécialisée et exigent une autorisation de la DRAC (déclaration préalable ou permis de construire, de démolir ou d’aménager). Pour autant, la distinction n’est pas toujours aisée : certaines interventions ne relèvent pas tout à fait des travaux de restauration mais ne sont pas non plus des travaux d’entretien et restent dans une zone grise qui freine le processus global de restauration. Pour éviter un impair et continuer à avancer avec tact, Rural Combo et les usagers prennent alors le parti de toucher le moins possible au bâtiment en installant des structures mobiles et en développant des astuces. Mais ce parti ne permet pas d’aller bien loin.
C’est pour répondre à ces interrogations et ces blocages très opérationnels que la Preuve par 7 a proposé à la Ville de Billom et à Rural Combo de mettre sur pied un atelier de travail avec les services de la DRAC, soutenu par la direction de l’architecture au Ministère de la Culture. L’objectif : définir collectivement un cadre, une feuille de route et des outils appropriés pour restaurer ensemble l’ancien Collège de Billom dans le cadre d’une programmation ouverte respectueuse des règles de préservation du patrimoine. Une permanence architecturale dans un bâtiment inscrit dont chaque intervention nécessite un dialogue étroit avec la DRAC, c’est également le projet mené par le collectif Zerm au couvent des Clarisses à Roubaix. Dès lors, il paraissait fructueux d’inviter Zerm à cet atelier organisé en juin 2022 par la Preuve par 7 (dont la démarche est notamment soutenue par le Ministère de la Culture), la Ville de Billom et Rural Combo. Organisé dans les locaux de la DRAC à Clermont-Ferrand, il a permis aux acteurs et actrices des deux projets de dialoguer avec plusieurs membres de la DRAC : le conservateur régional, l’architecte des Bâtiments de France, la conseillère architecture ; des ministères de la Culture avec le bureau de la qualité de l’architecture et du paysage et de la Transition écologique avec le bureau des stratégies territoriales.
La réouverture de l’ancien collège grâce à une permanence architecturale et dans le cadre d’une programmation ouverte rend la situation inédite, à tout le moins peu commune pour les services de la DRAC.
L’absence d’un programme défini au préalable, essence même de la programmation ouverte, bouleverse l’ordre établi et requiert d’interroger, de décloisonner les pratiques professionnelles ainsi que les métiers de la construction, de l’architecture ou de la conservation des monuments historiques. Elle pousse également à adapter la commande et à trouver une place pour la maîtrise d’usage au cœur de la maîtrise d’ouvrage.
La première étape de la feuille de route décidée lors de l’atelier repose sur l’élaboration d’un diagnostic fin des éléments patrimoniaux intérieurs pour identifier ceux qui nécessitent une restauration fidèle aux enjeux de conservation du patrimoine. De ce diagnostic pourront être tirées des prescriptions architecturales et techniques par la DRAC qui s’appliqueront aux interventions à mener. Il a également défini un phasage d’ouverture progressive du site, dans la continuité du diagnostic d’usages réalisé par Rural Combo.
Distinguant les travaux à mener pour la conservation du patrimoine, ce diagnostic permettra également de clarifier la « zone grise » entre travaux d’entretien et travaux de restauration. Il s’agira aussi d’identifier les interventions qui peuvent être réalisées par la maîtrise d’usage ou encore celles qui nécessitent l'intervention d'une maîtrise d’œuvre de restauration mobilisant des corps de métier spécialisés. Enfin, l’atelier a initié une gouvernance de projet souple et opérationnelle, dont les réunions mensuelles avec les services de la DRAC ont débuté en septembre 2022.
En parallèle, une deuxième campagne de travaux de gros œuvre, financée à 70% par la DRAC, a démarré en octobre 2022. Deux ans durant, elle va notamment se concentrer sur la réfection des couvertures et des charpentes. Les travaux concernent également le remplacement des fenêtres. La découverte de traces d’amiante a entraîné la mise en place d’un protocole sanitaire spécifique, et donc un surcoût d’opération, et a imposé une réduction de moitié du nombre de fenêtres remplacées pour tenir dans l’enveloppe budgétaire dédiée. Ont été alors privilégiés les espaces occupés, les usages, plutôt que l’harmonie patrimoniale. Lorsque les activités de l’ancien collège reprendront au printemps, la Perm pourra devenir un lieu de brassage et de rencontre entre les usagerEs, les habitantEs et les ouvrierEs du chantier.
La première mission d’assistance à maîtrise d’ouvrage et d’usage de Rural Combo expirait à la fin 2022. Début 2023, la mairie a relancé un appel d’offre pour une seconde mission, remportée par Rural Combo et un appel à manifestation d’intérêt pour l’occupation du collège, remporté par l’association La Perm. Cette seconde mission est davantage axée sur l’accompagnement architectural auprès de la Ville (en lien avec le chantier de gros œuvre et la réflexion menée avec la conservation régionale des Monuments Historiques). Rural Combo ne sera plus présent dans la gouvernance, gérée par La Perm, tout en restant disponible aux sollicitations de l’association, mais se concentrera sur la formation et la transmission aux adhérentEs, aux usagerEs et aux éluEs des outils de gouvernance et d’économie contributive déjà conçus et entre-temps perfectionnés. Mieux former et transmettre afin que l’expérience s’autonomise, grandisse et se poursuive au-delà.
La commune de Billom lance, début 2019, un appel d’offre « pour une mission d’animation pour la réappropriation et la mise en usage de l’ancien collège de Billom ». Ce marché est d’un genre nouveau : il dépasse la classique mission d’animation d’un lieu à destination du public et des scolaires en y ajoutant, grâce à la permanence architecturale, l’accompagnement de la commune et des futurs résidentEs dans une « stratégie d’occupation ». En somme, s’installer sur le site du projet, y mener des premiers travaux de sécurité et d’aménagement et travailler à sa programmation in situ et en action.
Rural Combo, un collectif qui habite dans les monts du Livradois, remporte le marché d’animation et de mise en usage de l’ancien collège de Billom et devient assistant à la maîtrise d’ouvrage. Un nouveau type d’assistance à maîtrise d’ouvrage qui combine, de manière inédite, l’occupation du site du projet ; sa mise en usage en lien avec les services techniques de la Ville pour la réalisation des travaux ; l’expérimentation et l’accueil d’activités plus ou moins ponctuelles aux fins d’en éprouver la valeur contributive dans les murs ; et, par la force des choses, la structuration d’une gouvernance.
Plans de mise en usage des différents espaces de l’ancien collège de Billom.
Convention d’occupation temporaire de l’ancien collège signée entre la Ville de Billom, Rural Combo et l’association La Perm. Son article 3 relatif aux assurances inclut une clause de renonciation à recours par laquelle les deux parties renoncent mutuellement à se demander réparation. Cette clause, relativement courante pour les monuments historiques, y compris dans le cas d’occupations temporaires, diminue le montant de la prime d’assurances tout en maintenant inchangé le niveau d’indemnisation.
Rédigés au travers d’ateliers avec les usagerEs de l’ancien collège, le schéma de synthèse et les valeurs socle entérinent les principes d’une association collégiale. Reprenant le vocabulaire de l’école, les adhérentEs de l’association sont des collégienNEs, diviséEs en quatre « classes » thématiques : communication, économie, régie et programmation. Chaque classe élit pour six mois deux déléguéEs qui sont donc huit à former le « conseil de classe », conseil d’administration de l’association avec huit co-présidentEs. La ville et Rural Combo y sont présents en tant que CPE, pour Conseillers Principaux d’Expérimentation, mais n’y ont pas droit de vote.
Les disponibles urbains : du glanage au réemploi, de la brindille au gisement, de l’anecdote à la norme, de l’expérience à la loi : entre outils théoriques et récits de projets, nous questionnons à partir de la permanence architecturale de Billom la puissance de l’expérimentation en entremêlant les langues.
Début 2023, la mairie a relancé un appel d’offre pour une seconde mission, remportée par Rural Combo, davantage axée sur l’accompagnement architectural auprès de la Ville (en lien avec le chantier de gros œuvre et la réflexion menée avec la conservation régionale des Monuments Historiques).
En 2023, la Ville de Billom lance un appel à manifestation d’intérêt pour l’occupation de l’ancien collège, remporté par l’association La Perm.
Début 2023, la mairie a relancé un appel d’offre pour une seconde mission, remportée par Rural Combo. Rural Combo ne sera plus présent dans la gouvernance, gérée par La Perm, tout en restant disponible aux sollicitations de l’association, mais se concentrera sur la formation et la transmission aux adhérentEs, aux usagerEs et aux éluEs des outils de gouvernance et d’économie contributive déjà conçus et entre-temps perfectionnés.
Support de présentation réalisé par le collectif Rural Combo en mai 2023. Y sont présentées les différentes étapes du projet depuis la réouverture de l'ancien collège en 2019, les missions réalisées par Rural Combo, la mise en usage des différents espaces, la constitution du collectif d'usagerEs et la structuration de l'association la Perm.
Soutenue par l'ANCT et France Tiers lieux, la Preuve par 7 a animé un wébinaire sur la remise en usage progressive et la réappropriation par les usagerEs comme méthode participant à la restauration de nos patrimoines historiques délaissés. Il a réuni Marc Drouet (Directeur régional des affaires culturelles Auvergne-Rhône-Alpes), Jacques Fournier (conseiller municipal délégué au patrimoine à Billom), Paul Chantereau (architecte, collectif Rural Combo, Billom) et Simon Givelet (architecte, collectif Zerm, Roubaix) qui ont partagé leurs expériences de leur point de vue de représentant de l’État, d’élu et d’architectes permanents.
Aujourd'hui le territoire est parsemé de lieux vacants hérités d'un passé proche ou lointain, publics ou privés, communs ou extraordinaires, monuments historiques, vernaculaires, populaires et parfois sacrés. Parfois ces lieux délaissés sont inhabités depuis longtemps, passent inaperçus, ont perdu leur valeur. Certains d'ailleurs n'ont pas forcément vocation à perdurer, tandis que d'autres, monuments historiques par exemple, font l'objet de projets de restauration. Si en architecture, réhabiliter un bâtiment consiste à le remettre en état, à le réparer, réhabiliter dans le langage courant signifie « rendre à quelqu'un ses droits perdus et l'estime publique ». C'est aussi l'objectif de cette démarche que de rendre une valeur par l’usage aux espaces aujourd'hui délaissés, oubliés, malgré parfois, un brillant passé. Réinvestir, réhabiter, réhabiliter le patrimoine est un parti pris fort et participe de sa conservation et de sa valorisation. Remettre les lieux en usage, c'est en prendre soin mais aussi permettre leur adaptation aux attentes et aux besoins d’un territoire et de ses habitantEs.
A Billom et à Roubaix, des éluEs ont souhaité travailler différemment pour redonner vie à des bâtiments patrimoniaux inscrits au titre des monuments historiques. Ils soutiennent des collectifs d’architectes qui ont investi ces bâtiments patrimoniaux et les remettent en usage. Ces architectes défendent l’idée d’une occupation quotidienne, d’une remise en usage progressive et d’une réappropriation par les usagerEs comme méthode participant à la restauration du patrimoine. Et chacun de se heurter au faisceau de contraintes réglementaires, architecturales et techniques auxquels sont soumis les projets de réparation patrimoniale, qui se conjuguent mal à l’indéfinition d’un programme a priori, principe même de la programmation ouverte. Partageant les mêmes intentions de préservation du site, architectes, éluEs, technicienNEs de la Ville ou de l’État, travaillent à définir collectivement un cadre d’intervention pour remettre progressivement le patrimoine en usage par de menus travaux en parallèle de travaux de gros œuvre, dans l'anticipation de ce qui serait dans tous les cas nécessaire quelle qu’en soit la programmation future.
Dès lors, comment réussir le pari de la réversibilité de l’architecture dont nous héritons ? Comment faire la preuve que la programmation ouverte participe de manière très concrète à la restauration du patrimoine ? Comment révéler l’apport de la mise en usage pour « déjouer » le temps long des processus classiques de restauration patrimoniale ? Comment travailler avec les services déconcentrés des monuments historiques pour restaurer petit à petit ces bâtiments inscrits en l’occupant, par l’usage ?
Pendant ce wébinaire, des supports de présentation des projets de remise en usage menés à Billom et à Roubaix ont été diffusés.
5 mai 2023
La remise en usage de l'ancien collège de Billom ouvre de nombreux questionnements quant à l’intervention sur un bâtiment patrimonial. En prenant les contraintes comme point de départ et en agissant progressivement, la mise à disposition de ces nouveaux espaces a suscité une programmation riche et multiple par les structures locales. Toutefois, la démarche de programmation ouverte, peu commune à la collectivité et aux services de l’État pour ce type de monument, s’accommode mal des protocoles usuels.
Pour répondre à ces interrogations opérationnelles, la Ville de Billom et Rural Combo, accompagnés par la Preuve par 7, ont souhaité mettre sur pied un atelier de travail avec les services de la DRAC associant également les administrations centrales des ministères de la Culture et de la Cohésion des territoire et de la Transition écologique, très impliquées sur ce sujet du patrimoine et de son réusage. Partageant les mêmes intentions et objectif de préservation du site, ils ont travaillé à définir collectivement un cadre d’intervention pour remettre progressivement le patrimoine en usage afin de contribuer à la revalorisation du lieu, dans l'anticipation de ce qui serait dans tous les cas nécessaire à son ouverture quelle qu’en soit la programmation future. Y a également été convié, dans une logique de compagnonnage, le collectif Zerm qui a également installé une permanence architecturale au sein d'un couvent néogothique inscrit au titre des monuments historiques à Roubaix. Cet atelier de travail a eu lieu le 21 juin 2022, il constitue un moment charnière pour le projet de restauration et de remise en usage du collège : le partage des objectifs de chaque partenaire dans le cadre de la programmation ouverte du collège de Billom et l’amorce d’une feuille de route adossée à des préconisations architecturales pour permettre la réalisation progressive des travaux d’aménagement intérieur concourant à la restauration de l’ancien collège. Ce carnet a pour objet d’en restituer les enjeux, les problématiques et les méthodes.
- Le « Typus religionis », dont l’auteur est inconnu, est aujourd’hui conservé aux Archives Nationales.
- Le plan local d’urbanisme est, en France, un document d’urbanisme et un outil de planification urbaine à valeur légale visant à encadrer l’urbanisation, à l’échelle communale, dans le respect des principes du développement durable. Document opposable, il réglemente la construction et réhabilitation des bâtiments à l’échelle de la parcelle. Entre autres fonctions, le PLU, qui peut être intercommunal, fixe l’affectation des sols, délimite des zonages, établit des zones constructibles et inconstructibles, ou encore établit des périmètres à protéger. Un PLU est adopté par le conseil municipal ou communautaire à l’issue d’une procédure impliquant l’avis des personnes publiques concernées ainsi qu’une enquête publique.
- Les fonds LEADER confient aux acteurs locaux regroupés en Groupe d’Action Locale une enveloppe pour cofinancer des projets publics ou privés qui favorisent le développement des zones rurales dans le respect de la stratégie locale de développement du territoire.
- Avant que l’association ne soit créée, Rural Combo, liée par convention avec la Mairie de Billom, rédigeait des sous-conventions avec chaque occupantE.
- Hormis l’assurance, les dépenses de l’association concernent les charges (eau, électricité…) et les menus travaux d’aménagement et d’entretien.
- cf circulaire NOR : MCCB0928988C du 1er décembre 2009 relative à la maîtrise d’œuvre des travaux sur les monuments historiques classés et inscrits.